Questions autour d'un port en eau profonde en Birmanie

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dreamman
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Questions autour d'un port en eau profonde en Birmanie

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Romandie News

RANGOUN - Des pelleteuses s'affairent à Dawei, dans le sud de la Birmanie, promettant à cette plage immaculée des transformations radicales. Mais entre promesses de développement, menaces de confiscation des terres et pollution garantie, l'avenir du site est plus qu'incertain.

Le projet industriel autour d'un port en eau profonde, qui pèse huit milliards de dollars, est significatif de ce que les voisins de la Birmanie, Chine et Thaïlande en tête, ambitionnent de faire dans l'un des pays plus fermés du monde, auquel l'Occident continue d'imposer des sanctions économiques.

Car si certains décrivent une opportunité unique de doper la croissance birmane et de révolutionner le commerce régional, d'autres craignent un afflux incontrôlé d'industries sales au mépris des droits des populations locales.

La Birmanie ignore les problèmes environnementaux, se réjouit ainsi sans détour Tanit Sorat, de la Fédération des industries thaïlandaises.

Dawei est la solution mondiale pour l'industrie qui touche l'environnement, l'industrie lourde, celle qui est interdite ailleurs, ajoute-t-il, en évoquant un potentiel total d'investissement de 60 milliards de dollars.

Les conséquences réelles du projet sur les riverains sont inconnues. Reste la réputation du régime militaire.

Un militant d'une organisation locale craint ainsi que 23.000 personnes soient déplacées et dénonce déjà l'explosion du prix de la terre. Le gouvernement ne se préoccupe pas des gens. Il fait ce qu'il a à faire.

Ces projets sont toujours accompagnés de violations des droits de l'Homme, dont des déplacements, la confiscation de terres, le travail forcé et les abus liés à la présence des forces de sécurité, renchérit David Mathieson, de l'organisation Human Rights Watch.

En revanche, Bangkok se frotte les mains. Les exportations du royaume transitent par le Golfe de Thaïlande, puis le détroit de Malacca après avoir contourné Singapour. Dawei, à hauteur de Bangkok, constituera un corridor vers l'ouest bien plus direct.

Il raccourcira par ailleurs la route du pétrole venu du Moyen-Orient selon un document d'Italthai, le développeur du projet, qui envisage aussi une voie de chemin de fer le reliant à la ville chinoise de Kunming, dans le Yunnan.

Somchet Thinaphong, en charge du projet chez Italthai, affirme pouvoir créer 100.000 emplois. L'emploi et l'éducation vont en bénéficier, pensez à la Thaïlande il y a trente ans, insiste-t-il en promettant une étude environnementale d'ici un an.

Des chiffres absurdes, répond Sean Turnell, expert de l'économie birmane à l'université de Macquarie à Sydney, en s'interrogeant sur le bénéfice que pourraient en tirer les Birmans.

Mais il ne doute pas, en revanche, que les investisseurs soient ravis: a Dawei, vous avez peu de chance d'avoir des inspecteurs de l'environnement qui viennent frapper à votre porte.

Les 250 hectares du complexe comprennent des usines de fertilisants et d'acier, une centrale au charbon, une raffinerie. Rien que du lourd et du salissant.

Il faut faire très attention quand on touche à l'environnement et à l'impact sur les habitants, rappelle Craig Steffensen, de la Banque asiatique de développement, pour qui Dawei représente un énorme potentiel régional. Reste à savoir si les autorités birmanes vont prendre les mesures préconisées par la banque.

En attendant, la route qui relie Dawei à Bangkok est presque terminée. Et le premier des trois bassins du port sera prêt d'ici cinq ans.

Sur le terrain, le militant tente de parer au plus pressé, en aidant les villageois à acquérir quelques connaissances pour trouver un emploi. Le défi, dit-il, est de réussir à participer au processus. Car il est en cours de toutes façons.


(©AFP / 05 juin 2011 09h25)
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