Un restaurateur belge en Thaïlande : "C'est le stress car le pire est à venir"

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dreamman
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Un restaurateur belge en Thaïlande : "C'est le stress car le pire est à venir"

Message par dreamman »

En septembre 2011, Quentin Seynaeve, ancien délégué commercial dans le milieu pharmaceutique, et son épouse ont décidé de quitter le Plat Pays pour changer de vie. Leur projet : ouvrir une chambre d'hôtes sur une île. Après avoir exploré diverses options, ils ont finalement pris la direction de la Thaïlande et plus précisément de Koh Phangan. Cette île située dans le sud du pays est connue pour la Full Moon Party. "Une horrible fête...", selon lui. Ce sont plutôt les plages et la nature qui les ont fait venir. "J'aurais du mal à retourner à Bruxelles, on a une qualité de vie magnifique, près de la moitié de l'île est un parc national." Il y a aussi, en principe, un nombre important de touristes qui débarquent chaque année sur l'île : un million en 2019. Ce ne sera évidemment pas le cas cette fois-ci.

Après "quasi 10 ans de travail acharné", le couple bruxellois est désormais propriétaire d'un hôtel sur la plage (le Seetanu Bungalows Hotel) et de deux restaurants (Belgian Beer Bar, et Signature Sea food & Grill). En ce moment, ils tentent tant bien que mal de survivre. Ils ont vu leur haute saison sapée par la crise du coronavirus et la fermeture des frontières. Et le pire est à venir. Combien de temps peuvent-ils tenir lorsque tous les touristes vont pouvoir quitter le pays ? Quentin Seynaeve est l'Invité du samedi de La Libre.be.

On ne vous demande pas si la période est compliquée...

On était en pleine saison quand on a été confinés. En mars, il y a beaucoup de monde, ce sont les vacances de Pâques, c'est Songkran, la fête de l'eau qui draine énormément de gens. On travaille habituellement bien jusqu'à fin mai. J'ai dû licencier 28 personnes sur 34, du jour au lendemain. Ce n'est pas cool du tout. J'ai dit à certains : 'ceux qui veulent rester, c'est à ces conditions-là : demi-salaire, je vous paie les logements, la nourriture'".

Tout est fermé ?

Les restaurants ferment, on ne fait que du take-away. Le resort est plein et on est complet en juin mais on loue à des prix qui sont complètement dérisoires et sans service. Je loue mes bungalows au lance-pierre en ce moment. On peut diviser le prix du bungalow par cinq par rapport à avant. C'est 350 euros/mois sur la plage et on peut mettre deux personnes dedans. On a décidé de faire des prix super bas pour attirer des gens. C'est l'offre et la demande. En tout, j'ai gardé deux cuisinières, un serveur-réceptionniste, mon épouse travaille, ainsi que deux jardiniers. Je loge aussi des membres du staff chez moi pour leur éviter de louer une maison à côté. Je travaille avec 90% de Birmans et ils ne peuvent pas rentrer chez eux. Ils laissent en général les enfants aux grands-parents en Birmanie et ils envoient quasiment tout leur salaire au pays. Ils vivent avec les pourboires. Tout s'est arrêté d'un coup pour eux. Ils ne peuvent pas rentrer chez eux car les frontières sont fermées. Et puis, même s'ils rentrent, que vont-ils faire ? Sur une île touristique, il y a toujours l'espoir de trouver un boulot. Ici, ils savent que quand ça va rouvrir, ils auront un travail.

Il était impossible de les garder ?

Financièrement, non. Le restaurant, c'est un beau chiffre d'affaires, ce n'était pas possible. Je n'avais malheureusement plus besoin de serveurs, ni de certains cuisiniers. Je n'ai pas non plus besoin d'avoir autant de personnes pour nettoyer les chambres tous les jours. On nettoie une fois par semaine. On ne fait pas d'argent en ce moment mais, au moins, on rentre dans nos frais.

C'est pour cette raison que vous avez mis en place une collecte de nourriture sur l'île ?

C'est une période qui n'est plaisante pour personne. Beaucoup de gens se sont fait virer sans aide, sans rien. Il n'y a pas de parachute en Thaïlande. Il n'y a pas de chômage ici. Les gens gèrent au jour le jour. Au départ, on avait mis une petite table, et on a démarré ça avant le 1er avril. Je recevais tous les jours des fruits, des légumes, du riz, de l'eau, des bananes. Le boulanger ramenait tout ce qu'il lui restait. La solidarité s'est mise en place très rapidement. Des locaux ont été intrigués. Une semaine après, ils ont emmené des tentes, d'autres tables. Puis le gouvernement, le maire, la police sont venus et ça a fait tache d'huile sur l'île. On servait 400 repas par jour, et des milliers sur toute l'île. J'ai fait ça pendant six semaines.



L'initiative se poursuit-elle ?

Une association a repris la main, maintenant, ça s'appelle "Happy food". Malheureusement, ils ne servent que du riz et plus qu'une fois par semaine : 3 kilos et demi par personne. Dans les rues, des espèces d'armoires ont été installées et chacun met et prend ce qu'il veut. En Asie, ça fonctionne bien. Chez nous, je crois que si tu fais ça, c'est pillé le premier jour. Certains cueillent des fruits dans la jungle ou pêchent des poissons et des crustacés. Pour survivre.

Pourquoi n'embauchez-vous quasiment que des Birmans ?

Parce qu'ils veulent bosser, c'est tout. Ils sont employés dans le monde de la mer, dans les marchés, les bâtiments, l'hôtellerie et la restauration. C'est pareil dans tous les restaurants des îles. La majeure partie des employés sont des Birmans.

Vous avez des nouvelles des gens que vous avez licenciés ?

Non, non... Ils logent chez des amis. Ils s'entraident beaucoup. C'est une grosse communauté sur l'île. J'en croise certains mais c'est sûr que personne n'a un job. Personne n'embauche. Ils attendent de meilleurs jours.

Quelle est justement la stratégie pour après ?

On en train d'y réfléchir. En août et septembre, ce sera évidemment différent. J'avoue que je ne dors pas très bien. On est toujours en stress, car le pire est à venir : lorsque les autorités vont rouvrir les frontières, tout le monde va partir. Il y a un moment où il n'y aura plus de touristes. Ils comptent relancer le tourisme local mais ça me fait bien rire, tous les gens ici sont fauchés, ils ont perdu leur emploi. Donc, le tourisme local, c'est une utopie.

Jusqu'à quand pouvez-vous tenir comme ça ?

On peut tenir jusqu'à la fin de l'année, mais on n'a pas envie de faire ça. Toutes nos économies vont partir là-dedans. On est même occupé à penser à se dire que, s'il y a peu de monde, on va fermer totalement le restaurant. Ouvrir me coûte de l'argent : l'électricité, la clim', le staff. On se pose encore pas mal de questions. On vit maintenant au jour le jour.

Vous pensez que certains touristes étrangers vont quand même débarquer cet été ?

Non... Si on a de la chance, je vois bien la reprise en septembre, octobre. Si on est moins chanceux, ce sera pour décembre. C'est encore très flou.

Les mesures sanitaires sont-elles respectées sur l'île ?

Le port du masque, pas tellement. Moi, je demande à mes serveurs du restaurant de le porter. On met du gel hydroalcoolique à disposition des clients. Dans les grandes surfaces, on te scanne tout le temps pour prendre ta température. Ils ont décidé, aussi, de tracer les gens, en installant un QR code dans les magasins. Les visiteurs doivent scanner ce code avec leur téléphone lorsqu’ils entrent et sortent. Sinon, le confinement ne s'est pas passé pas du tout comme en Belgique ou en France. Mon fils est à Grenoble, il a dû rester confiné dans un appartement et se munir d'une attestation pour sortir. Ici, rien. A Pattaya et Phuket, les plages ont été fermées. Pas ici.

Source; https://www.lalibre.be/
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oli
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Re: Un restaurateur belge en Thaïlande : "C'est le stress car le pire est à venir"

Message par oli »

La restauration et l 'hôtellerie comme en France est un milieu qui a subi de plein fouet cette crise sanitaire .
Beaucoup vont rester sur le carreau .
OLIV OLIV
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Marco
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Re: Un restaurateur belge en Thaïlande : "C'est le stress car le pire est à venir"

Message par Marco »

Fermer les restaurants et les commerces a probablement été la plus grande erreur prisent dans la précipitation par tous les gouvernements.
Elle a rendu plus inconfortable le confinement, a contribué grandement à la psychose ambiante, est responsable d'un marasme économique sans précédent et, en respectant un minimum les recommandations de base, n'a eu que peu d'effet dans le combat contre le covid19.

Ce qui a été le plus mal géré et qui est directement responsable de plus de la moitié des décès européens dû a ce virus ce sont les EPAD, EMS et autres foyers pour personnes âgées.

Ces derniers ne mettant plus les pieds dans les restaurants et les commerces. CQFD

Je suis certain que l'avenir nous le confirmera. dc-*
Les trois grandes époques de l'humanité sont l'âge de la pierre, l'âge du bronze et l'âge de la retraite.

http://atheisme.free.fr/
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NeedThaie
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Re: Un restaurateur belge en Thaïlande : "C'est le stress car le pire est à venir"

Message par NeedThaie »

Marco a écrit : mer. 10 juin 2020 11:34 Elle ... a contribué grandement à la psychose ambiante, est responsable d'un marasme économique sans précédent
Mettre la psychose était voulu, c'est clair et net (les médias ont joué à fond la cause).
Le choix de créer une crise économique, je me pose la question encore,
car au final, le bilan humain risque d'être pire que celui "évité"
(et largement pire qu'en se restreignant juste aux mesures phares).

Donc il ne fallait pas tuer l'économie locale,
mais il fallait restreindre les changements de régions/départements,
et surtout fermer à l'international
(ce que la France n'a pas vraiment fait, vu qu'il n'y a aucun confinement des arrivants)


Ca aurait duré plus longtemps, plus de morts directement, mais avec moins de dégâts globalement (long terme).
Par contre, ça a permis de rendre une bonne parti de la population encore plus soumise,
afin d'accepter toujours plus de restrictions des libertés individuelles.
Au train où ça va, on sera en europe dans 20 ans comme en Chine il ya 10 ans (et je suis optimiste).
Envoyé depuis mon PC en utilisant mes doigts sur le clavier (oui vous savez, le truc avec des touches)
NO SMARTPHONE IS SMART.
ALL LIVE MATTERS.
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